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Le thème de l’emploi est un thème récurrent dans la lutte contre la carrière de Brueil-en-Vexin. Et après enquête, la réalité de terrain apporte un démenti aux idées reçues. Pourquoi ?
Le chantage à l’emploi est entretenu par l’industriel cimentier pour sensibiliser les élus et la population en général à sa cause. Il martèle que sans carrière, les emplois de l’usine (103 salariés) sont menacés.
C’est une réalité. Dans l’industrie aujourd’hui, l’emploi est menacé en général, et non par l’action de l’AVL3C comme voudrait le faire croire Calcia !

Les emplois Calcia

Les emplois Calcia sont des emplois dit « exposés* ». C’est-à-dire des emplois soumis à la concurrence étrangère, à la hausse de productivité, à l’automatisation…
*La fabrique de l’industrie « Dynamique des emplois exposés et abrités en France »

Calcia Italcimenti a été racheté par Heidelberg, groupe multinational soumis au marché mondial. Il est évident qu’une restructuration se fera à la suite de ce rachat. Les pressions sont très fortes pour ce groupe qui défend sa deuxième place mondiale de producteur de ciment et troisième pour le béton   (Gargenville avec 530 000 t de production annuelle ne représente que  0.26%).
De plus, la cimenterie de Gargenville (1921) est très ancienne. Ses dernières modernisations datent d’il y a plus de vingt ans. Les mises aux normes, la robotisation, vont entrainer inévitablement une perte d’emplois.

  • Si la carrière se faisait, la restructuration et la modernisation obligatoires de l’usine réduiraient pour moitié les effectifs de Calcia. La carrière, elle, ne donnerait lieu à aucune création d’emploi puisque elle serait dans la continuité d’exploitation de Guitrancourt (moins d’une dizaine d’emploi).
  • Si la carrière ne se fait pas, la reconversion de l’usine permettrait le maintien d’une partie de l’effectif.

L’emploi est de toute façon menacé à Gargenville.

Le modèle économique du 20ème siècle, dans lequel le développement industriel entrainait un développement des emplois de proximité, n’existe plus. Ce sont maintenant les zones de développement du tertiaire qui créent de l’emploi. Et c’est en zone tertiaire et en zone résidentielle que l’emploi de proximité se multiplie. Ce qu’on appelle emploi « abrité* » (figure 3).
*La fabrique de l’industrie « Dynamique des emplois exposés et abrités en France »

L’emploi dans le Vexin

On nous parle emploi en vallée de Seine, mais parlons aussi emploi dans la vallée de la Montcient, dans le PNR du Vexin français. Moins visibles, cependant de plus en plus d’actualité, les emplois de zone rurale ne sont pas à négliger, loin de là !
Le paysage économique du Parc vexinois (crée en 1995) a changé.
En 2015, on dénombre 3 000 entreprises et compte environ 19 000 emplois locaux dans le Parc Naturel Régional du Vexin Français (Journal n°54 Novembre 2015).
L’économie du territoire n’est plus seulement orientée vers le secteur agro-industriel. L’enjeu consiste dorénavant à favoriser la création d’emplois locaux, permettant de limiter les déplacements domicile-travail, de répondre aux besoins et attentes des habitants et entreprises en accompagnant le développement d’une économie de proximité. (Couleurs du Vexin n°54 Nov 2015).
Le PNR, c’est aussi des emplois dans le domaine des loisirs, du tourisme, des métiers d’art, de l’artisanat, de l’éco-construction…
En 2015 est né « CAP VEXIN » Club des Acteurs du Parc qui est le reflet de ce nouveau dynamisme.

Le PNR est donc de plain-pied dans ce nouveau paysage économique qui pourra assurer l’emploi de demain[[Emplois d’Avenir:
Secteurs définis par le Ministère du Travail, de l’Emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social.
Les emplois d’avenir sont développés dans des activités présentant un caractère d’utilité sociale ou environnementale ou ayant un fort potentiel de création d’emplois et susceptibles d’offrir des perspectives de recrutements durables : filières vertes et numériques, secteur social et médico-social, secteur des aides à la personne, secteur de l’animation et des loisirs, tourisme, etc.]].

L’emploi autours de Brueil-en-Vexin

Et côté Brueil-en-Vexin ? là où pourrait se faire la carrière
Comment ne pas se poser la question de l’impact d’une carrière sur ces nouvelles formes d’emplois, dont beaucoup dans le secteur environnemental et touristique ? Une carrière à Brueil, ce n’est pas seulement la destruction de paysages d’exception, une menace pour l’eau, des nuisances (bruits, poussières) pour 30 ans, 60 ans…, une carrière à Brueil, c’est aussi une atteinte à un développement économique en pleine progression, un coup d’arrêt à une nouvelle synergie « urbain-rural  ».
Pour mieux connaître le profil entrepreneurial de cette zone, voici quelques chiffres tirés des fichiers du département Développement Economique du PNR, de la CCI -chambre du Commerce et de l’Industrie- et de Kompass. Ces données concernent les trois villages directement concernés par la carrière (même si les impacts d’une carrière toucheraient une zone bien plus large).

village Nbre entreprises (Chiffres PNR) Nbre salariés déclarés (chiffres PNR) Kompass CCI
Brueil 37 de 44 à 91 85
Sailly 14 de 33 à 72 13
Fontenay 25 de 33 à 52 75
Total 76 de 110 à 215 173 173

Les variantes observées s’expliquent par une approche différente : N° INSEE ou Registre du commerce. Pour Kompass : une prise en compte de toutes personnes morales, pour CCI uniquement les entreprises immatriculées au registre du commerce.

Parmi ces entreprises, certaines sont sur le territoire de la zone 109 et pourraient purement et simplement disparaitre (entreprises d’exploitation agricole) ou devoir se délocaliser (entreprise de BTP).
Plusieurs autres sont liées aux loisirs et au tourisme. Imagine-t-on le golf du Prieuré à Sailly, les étangs de pêche de la Ferme du Haubert ou le centre équestre La Cavale à Brueil sous le bruit et la poussière de la carrière
Soit 60 à 80 emplois …
A cela, s’ajoute le développement économique de proximité : les services, les métiers d’artisanat, de produits de terroir, les emplois liés au développement résidentiel avec les métiers du bâtiment, les métiers dédiés à l’enfance, à l’aide à la personne car il est évident que les villages situés sous une carrière n’attireraient plus de nouveaux résidents. Et pourtant aujourd’hui, c’est dans là que s’installent les nouveaux emplois liés au télétravail[[Quelques chiffres : CCI Paris Ile de France
– 17 % de la population active travaille hors de son entreprise plus d’un jour par semaine (79 % de leur domicile, 8% de télécentres), mais dans 67% des cas en dehors de tout formalisme ;
– 48 % des entreprises du CAC 40 se sont engagées à organiser le travail distance dans le cadre d’accords formalisés ;
– 76 % des salariés franciliens souhaitent télétravailler (98% des jeunes diplômés).]], au tourisme (gites, restauration), aux filières vertes…, les emplois dits « d’avenir ».
Selon la CCI, en moins de deux ans, on compte dans les trois villages cités 16 nouveaux établissements, soit une progression de 8%.
De nouvelles façons de travailler, de commercer, de consommer, de construire, de s’alimenter, de se déplacer se mettent en place.
Aussi en envisageant une carrière à Brueil-en-Vexin, l’industriel serait responsable d’un gâchis environnemental et d’un préjudice économique grave pour une zone rurale qui se verrait privée, en plus, de 104 ha de terres agricoles dans un premier temps puis cent autres ensuite !
Martine Tellier, AVL3C Vexin Zone 109, janvier 2017.