Alors que le projet est actuellement soumis à enquête publique, les contestations s’accumulent contre l’extension de la dernière carrière de ciment en Ile-de-France.

27 septembre 2018. Contre toute attente, le conseil communautaire de l’agglo Grand Paris Seine et Oise (GPS&O) vient de se prononcer contre le projet d’extension de la carrière de ciment située dans le parc naturel (PNR) du Vexin. Le président de la communauté d’agglomération, Philippe Tautou, s’était pourtant affiché en faveur du projet. Mais la fronde anti-carrière a gagné de nombreux soutiens de poids, à l’image de ceux des maires de Poissy et des Mureaux qui ont signé une motion contre le projet. Dans la foulée, de plus en plus d’élus ont rejoint le camp des contestataires.

Propriété du groupe allemand HeidelbergCement, l’usine Calcia de Gargenville ne pourra poursuivre son activité au-delà de 2020 que si une extension d’exploitation de carrière est accordée. Une cimenterie ne vit en effet que par l’utilisation du calcaire cimentier situé à proximité. Or, l’actuelle carrière de Guitrancourt est en fin de vie. Pour les opposants, l’exploitation d’une nouvelle carrière, à un mètre de la nappe phréatique qui dessert toute la vallée de la Montcient, ferait courir des risques de pollution de l’eau. « Une carrière de ciment, l’industrie la plus polluante qui soit, en aire urbaine, n’a plus aucune justification ! Sans compter que le projet d’extension se trouve dans l’une des parties les plus belles du Vexin qui pourrait développer un tourisme vert », fustige Dominique Pélegrin, présidente de l’association locale de défense de l’environnement, AVL3C.

Maintien de l’activité de cimenterie à Gargenville

Une position partagée par Bruno Caffin, le maire de Brueil-en-Vexin : « La véritable finalité de cette carrière, c’est d’assurer la pérennité de l’usine de Gargenville, alors que celle-ci crache plus de 1.000 tonnes de CO2 par jour dans la vallée de la Seine ! » Les anti-Calcia s’inquiètent également du maintien de l’activité de cimenterie à Gargenville. « Des études en 2012 ont notamment montré que la cimenterie de Gargenville représente le troisième plus gros émetteur d’oxydes d’azote d’Ile-de-France », insiste Dominique Pélegrin. De son côté, l’entreprise Calcia explique ne pas pouvoir s’exprimer en ce moment en raison de l’enquête publique. Mais, elle avait présenté il y a deux ans une nouvelle version du projet qui témoignait, selon elle, de son engagement pour qu’il n’y ait aucun impact environnemental. Pour Eric Roulot, le maire de Limay, favorable au projet d’extension, l’industriel aurait effectivement réalisé de gros efforts pour améliorer le process industriel et éviter les pollutions. « Les études indépendantes disent qu’il n’y a pas de risque pour l’eau, c’est un argument agité pour faire peur », ajoute l’élu qui insiste sur l’importance de conserver la centaine d’emplois de l’usine.

L’Etat passera-t-il outre ?

Cet été, les préfets des Yvelines et du Val-d’Oise ont adopté plusieurs arrêtés permettant l’avancée du projet. « Dans ce dossier, l’Etat s’est toujours positionné du côté des promoteurs du projet, en nous considérant comme des gêneurs », estime un opposant. Mais la nouvelle position de la communauté d’agglomération GPS&O conforte le combat des anti-cimenterie. « Il était facile de s’opposer à quelques maires ruraux. Aujourd’hui, le préfet va devoir passer outre l’avis d’une communauté urbaine de 400.000 habitants, ce n’est pas rien! » souligne Bruno Caffin. Les associations mettent aussi en avant la position du Parc naturel régional du Vexin. « Au-delà des inquiétudes légitimes concernant l’eau, la biodiversité ou la pollution, beaucoup d’interrogations sont toujours sans réponse, malgré nos questions au préfet : Comment ce projet s’inscrit-il dans l’économie de l’Ile-de-France, qu’est-ce que cela va changer dans la vie locale du secteur, pour les activités touristiques ? » interpelle Marc Giroud, président du PNR. Ce dernier souhaite d’ailleurs le recours à un médiateur, par exemple à la Commission nationale du débat public. La balle est maintenant dans le camp de l’Etat.